OPINION DU LECTEUR-Nous sommes un groupe de citoyens de la région qui avons pris connaissance de votre concours «Mon boss c’est le meilleur !» qui vise à remettre sept titres d’«Employeur engagé pour la réussite éducative» dans le cadre des Journées de la persévérance scolaire.
En remplissant un formulaire, les étudiant.e.s courent la chance de remporter un certificat-cadeau de 100$. Si nous vous interpellons aujourd’hui, c’est que nous ressentons un profond malaise face à ce concours et tenions à vous transmettre nos réflexions qui se veulent constructives.
Nous nous questionnons dans quelle mesure faire l’éloge d’un.e employeur.e – et donc de son entreprise – contribue à la persévérance scolaire. Ce concours remet un titre à un.e employeur.e et de l’argent de poche à un.e étudiant.e. COSMOSS ne semble pas avoir comme mandat de créer du capital social pour les entreprises sur le dos de la précarisation des étudiant.e.s. Il serait bien plus facile pour les jeunes de persévérer à l’école, s’ils et elles n’étaient pas obligé.e.s de travailler en même temps. Plusieurs études démontrent un plus haut taux d’échec scolaire chez les jeunes qui doivent concilier études et travail. Le fait de travailler alors qu’on est aux études est rarement un choix délibéré. Les étudiant.e.s qui travaillent le font car leur situation financière est bien souvent précaire. Si COSMOSS souhaite s’engager pour la persévérance scolaire, ne serait-il pas plus pertinent que l’organisation se mobilise contre la précarité étudiante ? Par exemple, en se positionnant en faveur de la gratuité scolaire, d’une plus grande accessibilité aux bourses ou encore pour la rémunération des stages.
Là où le concours pourrait être intéressant est dans sa volonté de faire reconnaître les bonnes pratiques de gestion qui encouragent la réussite scolaire et ouvrir la discussion autour des conditions de travail vécues par les jeunes de la région. Pourtant, il ne semble pas y avoir de volet sensibilisation aux employeur.e.s ou encore de réelle évalutation des conditions de travail qu’elles et ils offrent à leurs salarié.e.s. Plutôt, on demande à des jeunes qui ont peu d’expérience sur le marché du travail- et donc peu de points de comparaison possibles – d’encenser un.e employeur.e qui, essentiellement, respecte son horaire d’études et ses compétences. Si on souhaite que de telles pratiques se répandent, ne devraient-elles pas être défendues comme incontournables plutôt que présentées comme un acte méritant une reconnaissance particulière ? Doit-on réellement applaudir les employeur.e.s parce qu’elles et ils respectent leurs salarié.e.s ou simplement exiger qu’elles et ils le fassent ? Bien sûr, la valorisation des bonnes pratiques peut être un moteur de leur popularisation, mais prétendre qu’un “boss est le meilleur” parce qu’il offre un minimum de reconnaissance à son équipe et inviter des jeunes à les remercier envoie plutôt comme message qu’il s’agit de pratiques exceptionnelles et non de pratiques minimales à exiger de son employeur.e. En invitant les jeunes à remercier leur employeur.e, on entretient le mythe qu’elles et ils sont redevables de la “chance” d’avoir un emploi où leurs réalités sont minimalement prises en compte, comme si l’employeur.e ne gagnait rien à offrir des conditions de travail décentes à ses salarié.e.s ou ne tirait pas de bénéfice à les engager.