(Alexandre D’Astous)-De nombreux groupes environnementaux, citoyens et étudiants soulignent le dépôt aujourd’hui du projet de loi 21 « Loi visant principalement à mettre fin à la recherche et à la production d’hydrocarbures ainsi qu’au financement public de ces activités », mais demandent qu’il soit amendé pour fermer la porte aux cadeaux sous forme d’indemnisations que le gouvernement souhaite octroyer à l’industrie.
Après plusieurs années de mobilisation, le Québec est enfin sur le point de mettre un terme aux velléités de cette industrie du siècle dernier. Les groupes soulignent que le gouvernement fait un pas important dans le sens exigé par l’urgence climatique et par la population, et rappellent qu’il n’y a jamais eu d’acceptabilité sociale pour les forages de pétrole et de gaz au Québec.
Lors de l’étude détaillée du projet de loi 21, les groupes seront à pied d’oeuvre pour faire comprendre au gouvernement que la fin de l’exploitation des hydrocarbures au Québec doit se faire sans que des fonds publics soient octroyés aux entreprises pétrolières et gazières.
Pas de facture aux contribuables
Les groupes insistent pour que la facture liée à la fermeture des puits et à la restauration des sites ne soit pas laissée aux contribuables. Le gouvernement prévoit en effet payer 75 % des frais relatifs à la fermeture définitive des puits et à la restauration (estimés par le gouvernement à 33 millions de dollars de fonds publics pour le moment) aux entreprises pour qu’elles ferment correctement leurs puits en plus d’un montant de 67 millions de dollars en compensation pour frais d’exploitation. En absence d’analyse environnementale sur l’ensemble des puits, les groupes craignent que les coûts de restauration dépassent ce que le gouvernement a prévu et que ce sera aussi aux citoyen-ne-s de payer.
Pas de cadeaux
Les groupes à l’origine de la pétition Fini les cadeaux rappellent que donner des cadeaux aux pétrolières et gazières sous forme d’indemnisations est, selon un rapport du Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE), « un choix politique et non une obligation légale ». De plus, l’industrie des énergies fossiles a déjà coûté beaucoup trop cher aux portefeuilles des contribuables et à leur santé. Accorder des indemnisations à cette industrie créerait un dangereux précédent susceptible d’alourdir substantiellement les coûts de la transition énergétique.
Selon les groupes, le dépôt du projet de loi signe l’arrêt de mort des projets pilotes d’exploration et d’exploitation de gaz proposés récemment par l’industrie dans une dernière tentative de forer le sol québécois. Bien que le projet de loi ouvre la porte à des projets pilotes pour l’acquisition de connaissances géoscientifiques, le texte (article 42) est bien clair que ces derniers ne pourront pas permettre la recherche ou la production d’hydrocarbures.
Les groupes demeurent vigilants et feront connaître prochainement leur analyse plus complète du projet de loi.
Une vigilance de tous les instants
« Sans enlever le mérite à qui que ce soit, il faut voir dans le projet de loi déposé aujourd’hui le résultat d’une vigilance de tous les instants, de la mobilisation inlassable d’une centaine de groupes citoyens partout au Québec sur plus d’une décennie. L’éventuelle interdiction des forages pérennisera le succès de la lutte entreprise en 2010 contre l’exploitation du gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent, combat qui vise désormais et dans l’urgence à délaisser toutes les énergies sales pour les énergies propres », déclare Philippe Duhamel, coordonnateur général du Regroupement Vigilance Hydrocarbures Québec.
« Cela aura pris 10 ans de mobilisation citoyenne pour obtenir une loi encadrant les forages au Québec. Maintenant on doit viser moins d’un an pour en sortir avec une loi sans compensations financières. C’est fini les cadeaux », commente Martin Poirier, porte-parole de Non à une marée noire dans le Saint-Laurent.
« Avec le projet de loi 21, Québec mettra fin à l’une des plus grandes menaces pour la préservation de l’eau au Québec. Cependant, il est irresponsable d’offrir en cadeau de payer 75% des coûts de la fermeture des puits sans même connaître l’ampleur des dégâts laissés par ces industries. Les analyses environnementales manquent et on ignore toujours qui paiera pour cela! », indique Rébecca Pétrin, directrice générale, Eau Secours.
« C’est le début de la fin pour l’exploitation de pétrole et de gaz au Québec. Il reste maintenant à s’assurer que le projet de loi soit amendé pour qu’aucune indemnisation ne soit donnée en cadeau aux entreprises qui ont misé sur une industrie du passé. La société québécoise n’a surtout pas à payer pour le nettoyage et la fermeture des puits. Les dégâts causés par l’industrie des hydrocarbures doivent être payés par les responsables, et non par les contribuables », précise Alice-Anne Simard, directrice générale de Nature Québec.
« Solidarité Gaspésie salue le geste important que pose aujourd’hui le Gouvernement du Québec en déposant le projet de Loi 21 visant à interdire la recherche et la production d’hydrocarbures au Québec. Nous demeurons cependant inquiets quant à la nature et l’ampleur des indemnisations prévues pour les entreprises dont les licences sont révoquées. L’État québécois a déjà beaucoup investi dans les entreprises pétrolières et gazières. Les fonds publics devraient désormais servir à financer une transition énergétique verte, juste et équitable », affirme Carol Saucier, Solidarité Gaspésie.
*Groupes signataires du communiqué :
Association québécoise des médecins pour l’environnement (AQME)
Coalition étudiante «Arrêtons GNL»
Équiterre
Eau Secours
Environnement Vert Plus
Fondation David Suzuki
Front commun pour la transition énergétique
Greenpeace Canada
La Planète s’invite au Parlement-Gaspé
Mères au front
Mobilisation environnement Ahuntsic-Cartierville
Nature Québec
Prospérité sans pétrole
NON à une marée noire dans le Saint-Laurent
Regroupement vigilance hydrocarbures Québec (RVHQ)
Réseau action climat Canada
Solidarité Gaspésie