(M. J.) À Saint-Éloi, une salle porte son nom et on y retrouve sa maison natale. Qui se souvient qu’Adélard Godbout a été premier ministre du Québec en 1936, puis de 1939 à 1944 ? Ce politicien libéral, né à Saint-Éloi, avait des idées très progressistes pour son temps. Il mit en place de nombreuses réformes sociales et économiques. C’est grâce à lui que les femmes purent enfin voter, après des années de lutte pour obtenir ce droit.
Né en 1892 dans une famille de cultivateurs de vingt enfants, Adélard Godbout est d’abord tenté par la prêtrise. Après des études à Rimouski et aux États-Unis, il devient agronome puis professeur à l’École d’agriculture de Saint-Anne de la Pocatière. Par la suite, il marche sur les traces de son père Eugène Godbout qui a été député libéral de 1921 à 1923.
Élu par acclamation député provincial de L’Islet en 1929, pendant plusieurs années Adélard Godbout sera ministre de l’Agriculture dans le gouvernement d’Alexandre Taschereau qu’il remplace après sa démission en 1936. Lors d’élections anticipées, son gouvernement est défait par l’Union nationale de Maurice Duplessis.
Idées révolutionnaires pour l’époque
En reprenant le pouvoir en 1939, le gouvernement Godbout initie une série de changements qui transforment radicalement la société de l’époque : droit de vote aux femmes malgré opposition féroce du clergé et de plusieurs députés misogynes, reconnaissance du droit des travailleurs à l’association syndicale, fréquentation scolaire obligatoire jusqu’à 14 ans, gratuité des livres scolaires au primaire, nominations non partisantes des fonctionnaires, électrification du monde rural, appui à l’amendement constitutionnel qui verra la naissance de l’assurance-chômage et des allocations familiales.
Traître ou patriote ?
Dans son documentaire « Traître ou patriote » – disponible sur le site web de l’Office national du film – le cinéaste Jacques Godbout brosse un portrait de son grand-oncle, Adélard. Il rappelle qu’aux yeux de certains historiens, ce fédéraliste apparaît comme un traître parce que trop proche du gouvernement d’Ottawa et de ses politiques centralisatrices. Pendant la Seconde Guerre mondiale, Adélard Godbout ne s’opposa pas à la circonscription alors qu’au Québec, contrairement au reste du Canada, la population dénonçait cette initiative.
Sa mémoire
Lors du décès d’Adélard Godbout en 1956, André Laurendeau vanta ses mérites dans Le Devoir du 21 septembre : « Nous garderons le souvenir d’un homme probe et charmant, dont la carrière influença la vie politique du Québec, mais sur qui ont pesé des tutelles dont il n’a pu se dégager?: d’abord celle d’un régime contre quoi la province venait de se révolter, puis celle du gouvernement central. Plus que la plupart des chefs d’État québécois, il eut le sens de la liberté et crut en la démocratie. Il servit ses convictions à ses risques et périls avec un talent et une conscience admirables.»