Emploi-Québec répertorie plus d’une centaine de métiers considérés comme non traditionnels. Un métier est dit non traditionnel lorsqu’un groupe (hommes ou femmes) y est représenté à moins de 33 %. Portraits croisés de deux de ces métiers où l’on ne retrouve pas encore une majorité de femmes : une policière et une ambulancière des Basques.
« Je voulais un emploi où les journées ne se ressemblent pas. J’aime l’imprévu et le contact avec les gens », nous dit Hélène Miville, agente à la Sûreté du Québec depuis maintenant cinq ans. Affectée au poste de Trois-Pistoles où travaille une équipe d’une vingtaine de personnes, la policière dans la jeune trentaine patrouille la MRC des Basques. Elle parraine aussi la municipalité de Saint-Jean-de-Dieu. « Je rencontre la population dans les écoles ou les parcs. Ici en région, on ne sent pas d’animosité envers les policiers. Nous avons une belle collaboration avec les citoyens ».
C’est après des études en économie, en relations internationales et en langues – elle parle l’anglais, l’espagnol, l’allemand – qu’elle décide de devenir policière. Les qualités requises pour réussir dans ce métier ? « Avoir une bonne forme physique, une résistance au stress, être autonome tout en aimant le travail d’équipe. On doit prendre rapidement des décisions mais aussi vivre avec leurs conséquences ».
Des nerfs d’acier
Ne pas s’affoler quand c’est la panique autour de soi : la pistoloise Martine Bourgoin, ambulancière à Saint-Cyprien pour les Services ambulanciers CAMBI, en sait quelque chose. « J’aime cette adrénaline, il n’y a pas de routine, tu ne sais jamais ce qui va arriver lorsque tu sors de la caserne », lance-t-elle en ajoutant que s’il faut garder son sang froid dans toutes les situations, on doit aussi parfois se munir d’une carapace pour affronter la souffrance humaine. « Il faut avoir également l’humilité d’admettre qu’on peut être bouleversée dans certaines situations, d’être capable d’en parler avec nos collègues ».
Dans une situation d’urgence, la présence de l’ambulancière a souvent un effet d’apaisement. « Mais dans un bar à trois heures du matin, certaines personnes intoxiquées à l’alcool ou aux drogues peuvent devenir violentes. Mais je leur dis, je ne suis pas de la police, je ne suis pas là pour vous nuire. En général, ça les calme ».
L’ambulancière donne les premiers soins d’urgence, mais comme la population de la MRC des Basques est vieillissante, elle doit faire face à des pertes de conscience, des chutes et effectuer beaucoup de transferts de personnes âgées vers les hôpitaux. Son travail peut s’avérer périlleux : « Qu’importe la météo, on doit répondre aux appels d’urgence. Pour transporter un patient victime d’infarctus de Trois-Pistoles à Québec, il m’est arrivé, l’hiver en pleine tempête, d’être obligée que des policiers nous escortent sur la 20 ».
Toujours en formation, autant pour les techniques d’intervention que pour les nouveaux médicaments, Martine Bourgoin fait remonter à ses 12 ans le déclic pour devenir ambulancière : « Avec mon père, je suis arrivée sur les lieux d’un accident de voiture et j’ai pu voir le travail des ambulanciers. Cela m’a allumée, je me suis dit que c’est cela que je voulais faire dans la vie ».
Conciliation travail-famille
Que l’on soit policière ou ambulancière, la conciliation travail-famille peut être difficile à gérer. Hélène Miville, dont le conjoint est lui aussi agent à la Sûreté du Québec, a une petite fille et attend un autre enfant.
Martine Bourgoin travaille une semaine sur deux. Cela signifie plusieurs jours loin des siens. Autre obligation : elle ne peut s’éloigner de la caserne de Saint-Cyprien d’une distance de plus de cinq minutes, au cas où un appel surviendrait.
Des situations qui touchent particulièrement ces femmes ? Toutes deux sont unanimes : le sort des enfants va les chercher émotionnellement.
La policière relate un cas en particulier, soit celui d’un petit garçon tombé dans une piscine. « Quand nous sommes arrivés sur place, il était inconscient. Finalement, il a été sauvé et n’a pas eu de séquelles ». D’autres situations peuvent être troublantes. Comme celles entourant les enfants maltraités ou abusés sexuellement. « On voudrait les amener avec nous », indique la policière qui a eu à faire face à de nombreux cas de femmes battues. « C’est parfois plus facile pour une policière d’instaurer une bulle de confiance pour inciter une femme victime de violence conjugale ou de viol à porter plainte ».
Pour les interventions musclées, la policière transporte sur elle neuf kilos d’équipements : une arme, des menottes, un bâton rétractable, du poivre de Cayenne, un couteau, etc. « Si ça brasse fort, on a plusieurs techniques pour maîtriser quelqu’un de violent. Mais dans la plupart des cas ce n’est pas nécessaire d’avoir recours à la force, ça se règle souvent en communiquant verbalement, en jasant ».
Passion du métier
La policière Hélène Miville adore patrouiller. « Je pourrais faire cela durant toute ma carrière, tellement j’aime cela. J’ai vraiment l’impression de travailler pour la communauté, de rendre service aux gens?».
Quand à Martine Bourgoin, pour elle c’est un privilège d’être ambulancière, de pratiquer ce métier. « Je suis toujours contente de pouvoir aider les gens au moment où ils sont le plus vulnérables ».
C’est en 1975, que la Sûreté du Québec accueille sa première femme. Le congé de maternité s’ajoute au contrat de travail des policières signé en 1978 ; vers la fin de la décennie, la Sûreté comptait une vingtaine de policières. En 2013, sur les 5 816 policiers de la Sûreté, les femmes représentaient 21,4 % de l’effectif.